Quatre formes nécessaires de folie obligatoire – Mourir 25
L’infirmière en chef. L’aide soignante. Moi.
Moi, en tant qu’outil de travail pour elles. Moi, en tant que justification de la stupidité. Moi, en tant que méchanceté et en tant qu’inertie. En tant qu'entropie.
Moi, en tant que spectre aux formes trompeuses, capable de vampiriser ses descendants.
Elles, en tant que manipulatrices de mon corps, le corps du Moi.
Moi, avec ce que j’ai connu en racontant l’univers avec ma vie.
Moi, j’ai beau avoir senti, ressenti, pressenti, imaginé toutes sortes de choses, j’ai beau avoir porté à ma manière vacillante et pas trop convaincante, l’histoire, la grosse, la grande, imposante, écrasante, annihilante.
Elles, dans leur âme tressaute une problématique prolétarienne, qui efface et les idéaux moraux et les impulsions religieuses et même les joies subtiles et perverses de la connaissance, pour concevoir en échange comme unique réalité valide les acquis existentiels formés par « la vie socio-économique ».
Moi, je ne suis pas encore mort. C'est pour cela que la réalité grosse de non-sens traverse mon esprit.
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L’odeur de l’infirmière en chef, un soupçon d’arôme chaud. Je vis l’impression d'avoir été... abusé pendant mon sommeil. Par elle. En tout cas, d’avoir été en sa compagnie pendant ce laps de temps. Elle était ici, à côté de moi, en me tenant peut-être simplement la main.
Deux mains, une de vieillard, l’autre presque, avec leur peau fanée…
Et mon crâne trépané. Et mon cerveau que je ne peux pas voir. Ni mon anus. Ni le pancréas. La rate. La flore intestinale. Mon aura. Mon futur.
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Je me réveillai, la petite Lucie agrippée à ma main. Comme toujours, ses yeux vairons, l’un émeraude, l’autre or, donnaient l’impression d’avoir en face de moi deux jeunes êtres. Je ne savais pas qui me regardait. Et puis ce n’était même pas la question. Elle était là et ce n’était donc pas l’infirmière en chef mais ma petite-fille qui m’envoyait des pulsions vitales dans mes os.
Impossible d'avoir une confirmation définitive.
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Blog : www.alexandre-papilian.com/