Quatre formes nécessaires de folie obligatoire – Mourir 36
Savez vous ce que je viens de faire ?
Je n’ai pas dit à Jocelyn qu’il ne connaîtra jamais l’amour, jamais Dieu. Je me suis abstenu de lui parler de la joie, du bonheur, du chagrin ou du malheur de l’amour ; de Dieu. Il est trop fonctionnaire sup pour ça. Pour lui, les choses puissantes, doivent être simples, c’est à dire brutales. L’expression langue-boisée sèche est la seule concevable.
Je n'ai pas une vraie place dans sa vie.
Je ne lui ai pas dit sèchement qu’il ne rencontrera jamais la grâce de l’amour. Ni celle de Dieu.
Le goût empoisonné de ma simple prise de conscience à son égard m’était suffisant.
C’était le soir. Il rentrait d’un voyage (« important », je suppose) aux États-Unis. De l’aéroport, avant de se diriger vers son appart « de fonction » où l’attendait son mignon, il s’est empressé de passer me voir. Il se sentait bien ainsi : personnage important, responsable et fatigué, qui, avant d’aller se coucher (pour un sommeil hyper-mérité), passait voir son moribond de père…
La sensation qui a traversé tout mon trajet gastrique, du trou du cul au bout de la langue, a eu quelque chose d’électrique et de chimique. C’était de l’inconnu. C’était de l’agréable. C’était du nouveau.
Je ne lui ai rien dit. Rien. Rien. Rien !
Le futur, qui cache l'immense majorité des choses, existe toujours et encore ; à l’infini.
Mais le passé alors ?
Moi, je n’en ai plus besoin. Le présent me suffit. Parfois, même le présent est de trop.
Jocelyn n’aimera point ! Jamais ! Ce qui lui est réservé, c’est du rien et du jamais.
Quant à moi, je me meurs.
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