Les hommes, les femmes
Si les hommes n'aiment plus les femmes, mais les hommes ; si les femmes n'aiment plus les hommes, mais les femmes ; si les hommes et les femmes n'aiment plus les hommes et les femmes, à quoi servent-ils ? Je veux dire, les hommes, les femmes.
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Blog : www.alexandre-papilian.com/
S'il vous plaît !
Du coup, je me suis vue de l'extérieur. C'était moi qui regardais – et c'était moi qui étais regardée. Je me regardais moi-même. Ce qui est absolument impossible. Étrange, non ? Pourtant, j'avais entendu dire que ça existe. « Décorporation » que ça s'appellerait. Mais je n'ai jamais eu l'occasion de le vérifier, de la... vivre.
- Maintenant, voilà, c'est fait.
Je vis cette extériorisation. Nous nous trouvons dans le parc du Château de Versailles.
- Que je n'arrive pas à intérioriser, ni à assumer, ni à ... vivre.
Nous, c'est à dire ce qu'il (me) reste de ma famille. Ce qu'il nous reste.
Je suis la plus vieille de tous. Les autres sont les trois générations d'après. Mes enfants, avec leurs épouses et époux, leurs enfants et petits-enfants (en poussette).
- Et moi.
Je suis la Matriarche. Ils me fatiguent. Ils continuent ce que je n'ai pas terminé.
Le parc est ensoleillé. Nous nous trouvons aux environs du Trianon. C'est très agréable. L'atmosphère est dorée. L'automne commencera bientôt. C'est au 15 Août qu'on y bascule. Le jour de l'Assomption, autrement dit.
Ils jouent avec pas moins de quatre ballons. Nous avançons vers la Ferme de la Reine et nous échangeons des passes de ballons.
- Quatre.
Et alors ? C'est bien. Les petits courent à droite et à gauche et frappent les ballons avec leurs pieds, jambes, mains, têtes, poitrines. Je suis émerveillée. L'invention de la jambe et du pied est miraculeuse et mystérieuse. Plus encore que celle de la main et du bras. La chose est plus évidente lorsqu'elle est révélée par des enfants.
- C'est le cas.
Les mouvements de leurs membres douillets et légers (des ressorts qui les poussent vers le haut, comme s'ils voulaient prendre leur envol) me font rajeunir. Exit la vieille voûtée et lente dont on doit prendre soin. Exit la Mamie bienveillante et indulgente. Exit l'aïeule souriante et sage. Exit la surannée sereine et joyeuse. Exit l'Inconnue regardant secrètement et silencieusement vers le pays des ténèbres...
Tout ça n'est plus que de l'air. Peut-être, même pas. Ça n'existe pas. Ça n'a jamais existé.
On court. On, c'est à dire, moi. Je cours vers un ballon tombé dans une espèce de noue dont on vient de tondre l'herbe...
Maman, non ! Mamie, non ! Maman, Mamie, non, non ! Fais attention ! Non ! Non !
Je n'aime pas ces regards posés sur moi. Ces condamnations instinctives. Ni l'amour qui y perdure. Je me vois toujours de l'extérieur, capable de courir d'après le ballon.
Vraiment ? Serait-ce possible ?
- Serait-il possible, s'il vous plaît ? !
S'il vous plaît ! S'il vous plaît !
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Songe de fou
Je fais l'amour à Astrid. Il est midi. Le soleil brille et brûle. La chambre, lumineuse, est riche en meubles et couleurs. Du lux. Astrid est riche. Elle m'aime.
J'ai mis les jambes de Astrid sur mes épaules. Je lui demande de regarder le va-et-vient de mon sexe dans le sien. Elle soulève la tête. Sa crinière rouge atteint ma poitrine, mon ventre. Ça lui plaît. Se laisse tomber sur l'oreiller. Soupir chaud, abandonné. Regard profond, total.
Je capte une petite présence en hauteur, à droite, à la jonction tridimensionnelle des murs avec le plafond. Une présence, une attente. Un petit rire en argent.
Le regard de Astrid devient encore plus profond et doux.
Ses mains caressent mes fesses. Puis, ses bras se mettent autour de mon cou. Je descends la tête. Je lui ouvre la bouche avec ma langue. On se touche les langues. On fusionne.
Je me dédouble. Je me retrouve à l'intérieur de la petite présence au coin du plafond, à l'intérieur de son rire en argent. Dans les tripes d'une joie intense et incendiaire, sans fin.
J'y retrouve une autre joie, tout aussi immense et infinie que la mienne, un rire tout aussi béat que le mien.
Astrid. C'est elle.
C'est nous en fusion/apothéose.
Nous planons hors du temps.
Et zoup !, nous nous séparons. Sans déchirure. Bienheureux. Nous retrouvons tout en riant nos deux corps enlacés !
En tant que présences totales, nous savons que ce sont des futurs parents ceux qui soupirent, gémissent, rient. Qui nous fondent. Qui rient à nous. Nous perçons, nous foudroyons et soudons les corps enlacés. Nous pénétrons et distillons leurs songes qui rétrécissent, s'unissent et se renforcent dans un « nous » devenu « moi ».
Dès lors une force terrible me fait sortir du rêve pour me jeter dans la réalité du lit où je dors à côté de Astrid, ou, au contraire, où elle m'extrait de la réalité terre-à-terre pour m'enfermer et me digérer dans un songe ou dans la folie.
Je tairai toute cette histoire. Peu de gens la comprendraient. Voire personne. On ne comprend pas la réalité, ni la folie. Ni la beauté. Ni le bien. Ni l'enfant à naître. Ni la vie.
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Le VAGIN omnipotent
L'époque commence à devenir irrespirable. Le VAGIN s'infiltre partout. Il couvre tout. Il change la composition intime de la matière. Il veut être considéré la valeur du siècle.
Soit !
Moi, j'ai aimé les femmes dans ma vie. Beaucoup. Elles étaient douces et mystérieuses. La vie était joyeuse. Grâce à elle. Elles étaient souvent la joie même. Souvent, je dis !
Maintenant elles sont des « balanceuses des porcs », des porteuses vulgaires d'organes approximativement procréatifs, voire non-procréatifs.
Elles sont devenues répulsives, voire dégoûtantes.
Elles, les anciennes, mes vraies femmes à moi, me manquent.
Dommage !
Leur vagin me dit plus rien. Le VAGIN, hypertrophié, omnipotent, est devenu une perte. Il (s')est perdu. Les femmes avec lui.
Avec !
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