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  • : Alexandre Papilian
  • : Ne pas être seul dans la proximité de la création. - Partager ce qu'on peut partager pendant la lutte avec les ombres - pendant la danse avec. Personnalité(s) forte(s) et inconfondable(s), se faire intégrés dans des communautés riches en névrosées, bien intégrées dans le monde actuel.
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  • Alexandre Papilian
  • Ecrivain et journaliste franco-roumain. Le sarcasme dépasse de loin la tendresse qui,elle, reste un voeu créateur de nostalgie. Volilà !
  • Ecrivain et journaliste franco-roumain. Le sarcasme dépasse de loin la tendresse qui,elle, reste un voeu créateur de nostalgie. Volilà !

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8 juin 2018 5 08 /06 /juin /2018 15:53
 
 
                   Mais qu'est-ce que j'en sais, moi ?
 
 
     Je suis leur oncle préféré. À raison. À grande raison. Je comprends pourquoi. Moi aussi, si j'avais un oncle à préférer, j'aurais donné un très grand satisfecit à une personne comme moi.
     - À ma personne.
     Oui, je sais, ce n'est que trop modeste. C'est parce que la modestie n'est que la première parmi mes multiples qualités premières.
     - Je vous laisse le plaisir de dénouer cette énigme linguistique.
     Alors, quand Quentin est rentré au bercail, après deux mois de vrille, ils sont venus me voir.
     Ils avaient un problème de conscience, un problème de compréhension et, pas en dernière, un problème comportemental ou communicationnel, social et sociétal.
     - Comme vous voulez.
     Leur père, donc mon frère, est très différent de moi. Il est d'une nature calme, presque apathique. Ses joies et ses chagrins ne sont jamais enflammés. Il se couche à 22h et se lève à 6h. Il va au travail (une agence bancaire dont il est depuis peu le chef) et il revient avec des gestes sûrs et prévisibles. Ses vêtements le font fondre dans la masse qui, chaque matin, se déverse en voiture depuis les banlieues vers le centre-ville et qui, le soir, prend la route inverse, comme si la petite humanité locale était animée par des mouvements péristaltiques de sens contraires mais réguliers. 
Sa femme est une honnête femme, porteuse d'une très banale banalité. Ses deux enfants sont ni plus ni moins beaux ou moches, intelligents ou crétins que tant d'autres. Que tous les autres.
     Ils sont venus maintenant me voir.
     Depuis un moment, leur père, mon frère, avait déménagé chez sa maîtresse. Une nana qui l'avait attiré dans ses rets. Je ne la connais pas. Mais l'histoire se serait achevée aujourd'hui. Apparemment. En tout cas, il est revenu, la queue entre les jambes, au sein du foyer de sa matrone insipide, incolore et inodore...
     Je suis méchant, certes, mais doté d'un sens de la réalité assez remarquable, n'est-ce pas ? Sinon, pourquoi viendraient-ils, les deux post-morveux, chercher conseil et réconfort auprès de moi ?
     Je serais un ersatz de Bouddha, paraît-il. Pas trop grand, trapu, ventru, dégageant une sensation de confort, avec tous mes cheveux et presque toutes mes dents. Toujours bien rasé et parfumé. Avec une pochette dans la poche correspondante. Toujours joyeux. Je regarde sans crainte le vide d'en face. Je n'ai pas de femme, ni de petite amie. Mais j'ai une aura mensongère, qui dit que je serais plus qu'épanoui sexuellement, satisfait sentimentalement et psychologiquement.
     Ce n'est pas faux. La masturbation, à la mode aujourd'hui dans notre société gâtée, m'est suffisante. Voire, enrichissante. Je découvre, en me branlant, des choses inimaginables dans des temps normaux. Je les découvre en moi. Je suis riche de moi.
     C'est vrai que je connais moins de monde qu'à l'époque où je tirais sur tout ce qui bougeait, mais je n'en ai même plus besoin.
     Enfin.
     Mais pour revenir à nos moutons, les deux jeunes, mes neveux dont je serais paraît-il l'oncle préféré, sont venus me voir.
     - Comment réagir au retour de leur père ?
     Mais qu'est-ce que j'en sais moi ?
 
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5 juin 2018 2 05 /06 /juin /2018 08:27
 
 
 
                                  Monte-Cristo
 
 
     Je retourne sur une des îles de ma mémoire. Je suis jeune. Je n'ai que douze ans. Je suis la fille de mon père. (Et, accessoirement, de ma mère.)
     Je suis interdite du Comte de Monte-Cristo. Je n'ai pas le droit de lire ce roman – à cause du sentiment de vengeance. Mon père n'est pas d'accord que mon adolescence soit « polluée » par de tels sentiments. L'induction de la vengeance, par la littérature l’horrifie.
     Donc, niet ! Le Comte de Monte-Cristo ne sera pas lu par sa fille. Et tant pis pour la perte spirituelle de ma génération !
Bien entendu, je lu le livre en cachet. Presque tout de suite après l'injonction paternelle. Je le caché à l'école, dans mon casier, et je l'ai lu pendant les recrées et lors des heures d'études ou de colles.
     Il ne m'a pas plu. D'ailleurs, je ne comprenais pas tout. Les trucs financiers de l'époque, le Procureur du Roi, l'impossible évasion de Dantès, héritier de l'abbé Faria, l'impossible transformation de Dantès en de Monte-Cristo et toute ce charabia, n'avait plus rien à faire avec notre vie pleine de Iphones, tablettes et leurs précurseurs.
     Et de surcroît, le sentiment de vengeance nourri par Monte-Cristo, me paraissait et me paraît toujours, une sorte d'extravagance historique. Ça n'existe pas une telle vengeance. Non seulement qu'elle est impossible en réalité, mais elle est inutile.
      Mon vieux, donc, était vraiment vieux, du moment où il pouvait croire que son enfant pourrait encore vivre une vengeance malfaisante à la Monte-Cristo. Il était vieux aussi parce qu'il s'imaginait qu'une interdiction de type autodafé pourrait être respectée. Toujours vieux quant aux résultats positifs escomptés. Vieux toujours, en s'imaginant que je comprendrai le bien contenu dans le mal de sa décision.
Finalement, je m'en fiche. J'ai lu le livre en cachet. Pas plu. Ni plus tard, quand je le repris, pour essayer de mieux comprendre l'esprit paternel. Il me tombait des mains, le livre.
     Oust !
     Ce qui m'est venu par contre dans l'esprit, c'était une interrogation concernant le patriarche.
     Notamment : qu'est-ce qu’il a fait, lui, ou qu'est-ce qu'on lui avait été fait pour qu'il prenne une telle mesure radicale, vécue par moi comme une mesure méchante, lorsqu'elle n'était que ridicule ? 
 
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4 juin 2018 1 04 /06 /juin /2018 08:38

 

Les hommes, les femmes

 

      Si les hommes n'aiment plus les femmes, mais les hommes ; si les femmes n'aiment plus les hommes, mais les femmes ; si les hommes et les femmes n'aiment plus les hommes et les femmes, à quoi servent-ils ? Je veux dire, les hommes, les femmes.

 

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3 juin 2018 7 03 /06 /juin /2018 08:27
 
 
 
Besoin d'aura
 
 
     Elle me regarde ardemment et métalliquement. Ses paupières sont à moitié fermées. Les éclats de ses yeux sont coupants, tueurs. Elle n'est pas bien, dernièrement. Je ne sais pas si ce sont mes hésitations qui l'inquiètent, ou autre chose.
     Je n'y suis pour rien.
     - La gendarmerie me convient parfaitement.
    Jeune, très jeune encore, je suis envoyé là où on a besoin d'interventions ponctuelles. Paris, Lyon ou les DOM-TOM, d'habitude. Mais aussi les émeutes imprévues d'ailleurs.
Elle veut que je me marie et que je me stabilise. Ici, près d'elle, bien entendu. Elle ne supportera pas que j'aille en Nouvelle Calédonie ou dans les Îles ou à La Réunion... Il faut qu'elle puisse me voir quand l'envie lui prend. C'est à dire tous les jours. Je suis son fils. Son fils unique.  Pas question, en tout cas, que je lui échappe. Pas question que je m'échappe.
     Maintenant, après avoir mangé (trop), attablée en face de moi, elle essaye de me tirer les vers du nez. L'arôme du café au rhum exhale de tasses. Je suis un peu étourdi. Comme souvent quand je viens manger chez elle. Nous fumons tous les deux. Finalement, c'est pas trop mal. Je dirais même plus. Ce n'est pas si mal. C'est même bien.
     J'ai envie de faire la sieste. Il fait beau dehors. Par la fenêtre ouverte, la brise de la montagne apporte un parfum de miel. Je ne sais pas si c'est vrai. Mon impression est vraie, elle. Donc, un parfum de miel.
     Elle me dit qu'au marché, elle a été arrêtée par une bonne femme qui lui aurait dit qu'elle était très bien, que de son aura émanait du bonheur.
     Ses yeux métalliques essaient de me clouer. Elle est indiscrète et violente. On pourrait croire qu'elle veut savoir ce que je pense. Mais ce n'est pas vrai. Elle s'en fout. Absolument. Elle veut me faire comprendre qu'elle est forte. Elle veut me faire comprendre qu'elle sait beaucoup de choses. Elle veut me faire comprendre que le monde lui reconnaît beaucoup de vertus. Des vertus que moi, comme un poussin idiot, ne serais pas capable de capter.
     Il y a deux, trois semaines, elle m'a raconté comment elle s'était fait draguer par un type dans une super voiture. Il lui avait demandé combien elle prenait pour lui tailler une pipe. Pour lui, elle était une pute. Et cela lui faisait plaisir.
     - Je ne sais pas pourquoi. 
     Et maintenant, on était informé qu'elle avait une aura. Rayonnante. Bienheureuse.
     Elle me regarde ardemment, métalliquement. À travers son aura. Derrière son aura.
     J'ai envie de faire ma sieste. Une petite sieste.
     - Une toute petite.
 
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2 juin 2018 6 02 /06 /juin /2018 07:13
 
 
 
                         Il est dur que d'être jeune
 
 
     - Allô, papa ?
     Il est quatre heures du matin.
     - Oui ma puce.
     J'essaie de ne pas paniquer. Mais comment ne pas paniquer pourtant à quatre heures du matin lorsque ta fille, Véro (dix-huit ans la veille), t'appelle de l'extérieur ?
     -T'es où ?
     - Au Lido.
     Vu. Elle a du goût, ma fille. Le Lido c'est très bien. Lorsqu'on était jeunes, Lili et moi, nous nous y rendions assez souvent... Maintenant, c'est le tour de nos rejetons.
     - Qu'est-ce qu'il t'arrive ?
     - Tu peux venir me chercher ?
     - À cette heure-ci ?
     - La police est venue et a embarqué Vladimir.
     - Embarqué ?
     - Mais je n'ai rien fait, moi. 
     - Bon, j'arrive.
     Je ne sais pas ce qu'ils ont fait, mais ce n'est pas bon. De toute évidence. Heureusement, c'est arrivé après l'anniversaire de Véro. Sinon, les mineurs dans une boîte de nuit...
     - Qu'est-ce qu'il y a ?
     Lili parle à peine. Sans trop se fatiguer. Elle dort encore. Notre lit sent bon. C'est la lessive. Plus les gels douche. Plus les crèmes de nuit de Lili.
     - Je vais la chercher.
     La voiture est dans la rue. Encore un peu et je me retrouve dans la voiture qui est dans la rue. Ensuite, encore un peu et la voiture qui est dans la rue et moi, dans la voiture qui est dans la rue, nous nous arrêtons devant le Lido.
     Quatre heures vingt. Véro est invisible. Je sors de la voiture et je regarde à droite et à gauche. Dans la rue il n'y a que le froid. Un froid humide de février. L'enseigne de la boîte clignote comme ça, toute seule. Lido – Lido – Lido.
     - Pour moi.  
     La voilà ! Véro se dirige vers moi en courant. Je ne sais pas d'où elle sort, mais ce n'est pas de la boîte. En tout cas, je ne l'avais pas vue sortir de là.
     Nous montons dans la voiture. Je démarre le moteur et j'attends des explications. Le chauffage fonctionne.
     Véro porte un jeans, un haut lilas, une veste en cuir bordeaux, serrée. Pas trop de bijoux. Mais pas peu non plus. Au cou, aux poignets, dans les cheveux.
     - Alors ?  
     Il se serait énervé, Vladimir. Sous prétexte que Véro se serait fait – et laissée – draguer par Jimmy. C'était un noir. Mais ce n'était pas le problème. Le problème c'était le noir qui régnait dans la boîte. Qui rendait les choses invisibles. Mais elle n'avait rien fait. Or Vladimir se serait fâché pour rien. Il s'est énervé. Sans rien voir dans ce noir-là. Il est sorti dans la rue et il a arraché deux rétroviseurs des voitures stationnées dans la rue. Les videurs sont intervenus. L'ont maîtrisé. Ont appelé les flics. L'ont fait entrer, elle, à l'intérieur, pour que les flics ne l'embarquent pas elle aussi. Mais elle n'avait rien fait. Rien. Ni avec Jimmy, ni plus tard. Et Vlady (Vladimir, ben voyons) s'est énervé comme ça, pour rien.
     - Il est jaloux.   
     Véronique sourit avec un fin mais certain orgueil. Elle regarde son téléphone qui vibre.
     - Ils l'ont relâché.
     Pourrions-nous aller au Commissariat le chercher ? Ensuite ils prendront un taxi. Ou, pouvais-je, moi, les emmener chez Vladimir ? Je peux ? Je peux ?
     - Oh, merci papa chéri-chéri.
     Elle n'avait rien fait. Rien. Et tout le monde s'est agité comme ça, à partir du rien. Avec Jimmy, Vlady, les videurs, les flics – et tout !
     - Oh là là, que c'est dur que d'être jeune !
     Oh là là. Je te jure. Dur-dur. Trop.
     Dur.
 
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30 mai 2018 3 30 /05 /mai /2018 07:45
 
 
 
Tous les mecs sont des salauds
 
 
     Je le sais. Je le sais depuis longtemps. Depuis toujours peut-être. Et même plus. Ils sont tous des salauds. C'est de naissance. C'est dans leur nature. Laurent ne fait pas exception. Pourquoi en ferait-il ?
     Comme toutes les mères juives, je trouve que mon fils est le nec plus ultra des mecs. C'est à dire beau, joyeux, intelligent, charmant, toujours et toujours vainqueur mais jamais et jamais pleinement conscient de son propre intérêt, toujours et toujours sur le bord de la catastrophe.
     Il a une femme comme toutes les femmes. Belle (sans trop ; elle n'attire pas les bourdons), calme et douce, intelligente et soumise... Une fleur. Modeste, mais belle. Une fleur.
     Maintenant elle s'est mise à faire un enfant à Laurent. Si je ne suis pas morte de bonheur c'est parce que le miracle existe.
     Mais, problème ! Les choses ne vont pas comme il faut entre eux. Laurent, comme tous les mecs, n'est qu'un salaud. Un salaud qui ne voit pas plus loin que le bout de son nez. Ou, plutôt, pas plus loin que le bout de son zizi. Il ne voit pas son intérêt, sont vrai intérêt. Notre monde est régi par une loi tantôt masculine, tantôt féminine. Bref une loi masculine-féminine. Si un mec regarde trop d'après les nanas, c'est pas bien ; mais s'il ne regarde pas, c'est pas bien non plus. Laurent est porté par le temps du regard. Il regarde d'après les nanas et elles le lorgnent aussi. Je pense qu'il y a trop de femme dans notre société, dans notre monde. D'ailleurs, ça se voit un peu partout. Elles ont conquis presque tout le pouvoir dans la société. Tout le pouvoir de la société. Tout le pouvoir du monde. Je trouve ça compliqué mais bien. Néanmoins, il faut savoir raison gardée.   
     C'est dans les gènes des hommes que d'être des salauds. De baiser tout le temps, avec ou sans le plaisir de la femme. Plutôt sans. Mais que Dieu le Grand la garde, la femme, si elle marchait à côté ! Elle doit se soumettre, se contenter de faire des enfants, beaucoup, tous les enfants du monde. Et que je te prépare les repas festifs. Et que je t'épaule lorsqu'on n'a pas obtenu l'avancement visé. Ou lorsqu'on frôle la ruine économique et/ou sociale de la famille...
     J'en fais partie, certainement. Mais cela ne m'empêche de voir la réalité en face.
     Laurent s'est trouvé une pouffiasse pour la sauter. Il est assez aveuglé par l'asphalteuse qui se les écarte pour lui. Je l'ai vue deux fois, tout à fait par hasard. Elle n'est pas mal, mais elle se pomponne trop. Elle veut plaire. Non seulement à Laurent, mais au monde des hommes, de tous les hommes. Et du coup, snober les femmes. Une salope ! Elle fait pitié ! Il y a des femmes comme ça. Je le sais par propre expérience.  Je sais aussi que l'homme peut se laisser envoûter par les sirènes plus ou moins horizontales.
     Mon problème n'est pas Laurent, pour autant, mais Leila. Elle ne mérite pas un tel Laurent. Elle souffre, je le vois bien. Un petit moineau endolori. Elle souffre beaucoup. Mais lui, le salaud, continue d'aller voir ailleurs, de voir la traînée. Quelle race de femme peut faire ceci à une de ses consœurs qui attend un enfant ?
     Il ne voit pas, l'idiot, qu'il ne trouvera pas une autre Leila. Il ne voit pas que l'autre, prête à prendre l'homme d'une autre, ne peut être qu'une pute, une traînée, une morue. Elle ne peut pas faire le bonheur d'un homme et de sa famille.
Je ne sais pas quoi faire. Je ne crois pas pouvoir diriger Laurent. Pour lui je suis sa maman, certainement. Sa maman, c'est à dire, une femme. Un être pas vraiment supérieur.  Même si je suis sa mère, je suis la mère d'un salaud. Pauvre Leila ! Il va la perdre ma petite bru, le malheureux !
 
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28 mai 2018 1 28 /05 /mai /2018 07:58
 
 
Gang
 
 
     Huit années de prison. Cinq enfants placés. Je n'ai rien à foutre d'eux. De leurs pères encore moins. Des bites qui répandent du sperme et qui touchent mon clitoris en le faisant vibrer. Et puis plus rien. Eux, ils s'évaporent de leur côté, pour trouver leurs drogues à sniffer et à dealer. Moi, de l'autre côté, et s'il se trouve pour la même drogue...
     Les enfants, moi non, je n'ai pas envie de les voir. À quoi bon ? Ils ne me reconnaîtront même pas. Moi non plus, je ne les reconnaîtrai pas. Ou, s'il se trouve que si, ils auront le crâne bourré de merde. Bourré de ce que les autres leur auront mis dedans. Ils ne pourront pas m'aimer. Ni me respecter. Ils ne savent pas qui je suis. Comme tous les autres, d'ailleurs. Non, non. Je les ai abandonnés, diront-ils. J'encombrerais leur vie. Sans leur donner quelque chose en échange. Mes années de prisons mis à part.
     Ma vie ne se développe plus, elle s'écoule. Comme ça – sans « ça ».
     Je n'aime pas travailler. Qui peut aimer travailler ? Les connards. Les pigeons.
     Les pigeons sont faits pour qu'on les déplume. Qu'ils travaillent, alors. Pour qu'on les déplume. Ils doivent payer leur droit d'exister. Pour eux, l'existence existe. En tout cas, ça compte, l'existence – pour eux. Ça compte tellement, qu'ils n'osent même pas appeler les flics quand on leur fait les poches. Ou plus. Quand on leur demande de payer leur dîme. Ils savent qu'ils resteront seuls après. Seuls avec nous. Pour eux, la police n'est que trop inutile.
     Pour nous, par contre, les flics sont plus que nécessaires. Sinon, tout le monde pourrait monter des gangs. Même les pigeons. Les politiques, les banquiers, les toubibs, les pompiers, et même la flicaille, le blacks, les jaunes, les patrons, les syndicats et tout ça, ne sont que des bandes, des bandes et encore des bandes.
     Quand on va punir ceux ou celles qui ne respectent pas notre territoire, la police pourra être utile si les autres étaient plus forts. Ou plus fortes. Vu que les gangs de nanas commencent à exister et à se faire exister. Les flics, que l'on connaît plus que bien, peuvent nous éviter la mort. Que ce soit chez les autres ou chez nous.
     Une vie sans flics, c'est pas possible.
     Sans prisons, non plus.
     Les flics, c'est bien. Les prisons, aussi.
     Les mecs, de temps en temps.
     Les enfants jamais. Ou, peut-être, plus tard. Lorsqu'il sera trop tard.
 
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22 mai 2018 2 22 /05 /mai /2018 07:19

 

S'il vous plaît !

 

 

     Du coup, je me suis vue de l'extérieur. C'était moi qui regardais – et c'était moi qui étais regardée. Je me regardais moi-même. Ce qui est absolument impossible. Étrange, non ? Pourtant, j'avais entendu dire que ça existe. « Décorporation » que ça s'appellerait. Mais je n'ai jamais eu l'occasion de le vérifier, de la... vivre.

     - Maintenant, voilà, c'est fait.

     Je vis cette extériorisation. Nous nous trouvons dans le parc du Château de Versailles.

     - Que je n'arrive pas à intérioriser, ni à assumer, ni à ... vivre.

     Nous, c'est à dire ce qu'il (me) reste de ma famille. Ce qu'il nous reste.

     Je suis la plus vieille de tous. Les autres sont les trois générations d'après. Mes enfants, avec leurs épouses et époux, leurs enfants et petits-enfants (en poussette).

     - Et moi.

     Je suis la Matriarche. Ils me fatiguent. Ils continuent ce que je n'ai pas terminé.

     Le parc est ensoleillé. Nous nous trouvons aux environs du Trianon. C'est très agréable. L'atmosphère est dorée. L'automne commencera bientôt. C'est au 15 Août qu'on y bascule. Le jour de l'Assomption, autrement dit.

     Ils jouent avec pas moins de quatre ballons. Nous avançons vers la Ferme de la Reine et nous échangeons des passes de ballons.

     - Quatre.

     Et alors ? C'est bien. Les petits courent à droite et à gauche et frappent les ballons avec leurs pieds, jambes, mains, têtes, poitrines. Je suis émerveillée. L'invention de la jambe et du pied est miraculeuse et mystérieuse. Plus encore que celle de la main et du bras. La chose est plus évidente lorsqu'elle est révélée par des enfants.

     - C'est le cas.

     Les mouvements de leurs membres douillets et légers (des ressorts qui les poussent vers le haut, comme s'ils voulaient prendre leur envol) me font rajeunir. Exit la vieille voûtée et lente dont on doit prendre soin. Exit la Mamie bienveillante et indulgente. Exit l'aïeule souriante et sage. Exit la surannée sereine et joyeuse. Exit l'Inconnue regardant secrètement et silencieusement vers le pays des ténèbres...

     Tout ça n'est plus que de l'air. Peut-être, même pas. Ça n'existe pas. Ça n'a jamais existé.

    On court. On, c'est à dire, moi. Je cours vers un ballon tombé dans une espèce de noue dont on vient de tondre l'herbe...

     Maman, non ! Mamie, non ! Maman, Mamie, non, non ! Fais attention ! Non ! Non !

     Je n'aime pas ces regards posés sur moi. Ces condamnations instinctives. Ni l'amour qui y perdure. Je me vois toujours de l'extérieur, capable de courir d'après le ballon.

     Vraiment ? Serait-ce possible ?

     - Serait-il possible, s'il vous plaît ? !

     S'il vous plaît ! S'il vous plaît !

 

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17 mai 2018 4 17 /05 /mai /2018 08:42

 

 

Songe de fou

 

 

     Je fais l'amour à Astrid. Il est midi. Le soleil brille et brûle. La chambre, lumineuse, est riche en meubles et couleurs. Du lux. Astrid est riche. Elle m'aime.

     J'ai mis les jambes de Astrid sur mes épaules. Je lui demande de regarder le va-et-vient de mon sexe dans le sien. Elle soulève la tête. Sa crinière rouge atteint ma poitrine, mon ventre. Ça lui plaît. Se laisse tomber sur l'oreiller. Soupir chaud, abandonné. Regard profond, total.

     Je capte une petite présence en hauteur, à droite, à la jonction tridimensionnelle des murs avec le plafond. Une présence, une attente. Un petit rire en argent.

     Le regard de Astrid devient encore plus profond et doux.

     Ses mains caressent mes fesses. Puis, ses bras se mettent autour de mon cou. Je descends la tête. Je lui ouvre la bouche avec ma langue. On se touche les langues. On fusionne.

     Je me dédouble. Je me retrouve à l'intérieur de la petite présence au coin du plafond, à l'intérieur de son rire en argent. Dans les tripes d'une joie intense et incendiaire, sans fin.

     J'y retrouve une autre joie, tout aussi immense et infinie que la mienne, un rire tout aussi béat que le mien.

     Astrid. C'est elle.

     C'est nous en fusion/apothéose.

     Nous planons hors du temps.

     Et zoup !, nous nous séparons. Sans déchirure. Bienheureux. Nous retrouvons tout en riant nos deux corps enlacés !

     En tant que présences totales, nous savons que ce sont des futurs parents ceux qui soupirent, gémissent, rient. Qui nous fondent. Qui rient à nous. Nous perçons, nous foudroyons et soudons les corps enlacés. Nous pénétrons et distillons leurs songes qui rétrécissent, s'unissent et se renforcent dans un « nous » devenu « moi ».

     Dès lors une force terrible me fait sortir du rêve pour me jeter dans la réalité du lit où je dors à côté de Astrid, ou, au contraire, où elle m'extrait de la réalité terre-à-terre pour m'enfermer et me digérer dans un songe ou dans la folie.

     Je tairai toute cette histoire. Peu de gens la comprendraient. Voire personne. On ne comprend pas la réalité, ni la folie. Ni la beauté. Ni le bien. Ni l'enfant à naître. Ni la vie.

 

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14 mai 2018 1 14 /05 /mai /2018 13:33

 

Le VAGIN omnipotent

 

     L'époque commence à devenir irrespirable. Le VAGIN s'infiltre partout. Il couvre tout. Il change la composition intime de la matière. Il veut être considéré la valeur du siècle.

     Soit !

     Moi, j'ai aimé les femmes dans ma vie. Beaucoup. Elles étaient douces et mystérieuses. La vie était joyeuse. Grâce à elle. Elles étaient souvent la joie même. Souvent, je dis !

     Maintenant elles sont des « balanceuses des porcs », des porteuses vulgaires d'organes approximativement procréatifs, voire non-procréatifs.

     Elles sont devenues répulsives, voire dégoûtantes.

     Elles, les anciennes, mes vraies femmes à moi, me manquent.

     Dommage !

     Leur vagin me dit plus rien. Le VAGIN, hypertrophié, omnipotent, est devenu une perte. Il (s')est perdu. Les femmes avec lui.

     Avec !

 

 

 

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