8 juillet 2018
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06:12
Platon ou plus
Non, ce n'est pas une blague. Ce ne sont pas des blagues. Car il y en a deux.
La première.
Ancien cheminot, je suis à la retraite. Je profite pleinement de cette retraite. Ayant le transport SNCF gratuit, j'en fais bon usage. Je vais voir mes seize enfants – oui, seize, de mères différentes – répandus un peu partout dans l'hexagone. Une semaine, dix jours chez chacun d'entre eux, et l'affaire est dans le sac. Je leur suis utile. Soit comme bricoleur, soit comme baby-sitter. Quant à moi, je ne meurs pas d'ennui. C'est donnant-donnant, gagnant-gagnant.
(Ce n'est pas l'endroit pour parler pension alimentaire. Mais je vais vous dire pourtant qu'après le quatrième enfant, les mamans ont compris que mieux valait renoncer aux trois fois rien que j'aurais pu verser pour chacun des enfants, pour garder de bonnes relations avec leur père. Le résultat a été excellent. – Je viens de l'évoquer.)
La seconde.
Il s'agit des mots que le Commandeur Phillipaire a utilisés hier, à l'heure de l'apéro chez Giorgio (le nom du patron du Nautilus, notre bistro).
« Tu n'as pas lu Platon, par hasard, hein ? » qu'il m'a dit.
« Tu me vois lire des trucs pareils ? que je lui ai répondu. Il paraît qu'il avait la grosse tête. Totalement et absolument. Mais c'est pas ma tasse de thé ».
C'était après mon exposé peut-être un peu maladroit, mais plein de sens, je trouve, que je leur avais fait, au Commandeur, à Charlie Vaud et à Bobby Landouge quelques minutes auparavant.
Ci-joint ce que j'ai dit.
« Lorsque je rends visite à mes enfants, je suis amené à jouer le rôle du patriarche. Le rôle du sage. Surprenant, non ? Pourtant, je me sens à l'aise. Je trouve quoi leur dire. Mais aussi comment leur dire. Je ne le crois pas à moi-même. J'ai répandu seize enfants aux quatre coins de la France, mais je ne suis pas un simple reproducteur, un animal, une bête idiote, stupide. Je suis quelqu'un capable de dire des choses intelligentes qui laissent pensifs ceux qui m’en font la demande. Qui donne un sens et un contenu à la transmission du savoir parents-enfants.
« Jusqu'ici, rien d'anormal. C'est normal que le père transmette à l'enfant ce qu'il sait. C'est normal que l'enfant l'écoute. (Même si, à partir d'un certain seuil, il trouve que le vieux est gaga...) Normal, donc... Pourtant, je sens que les choses m'échappent. Je ne contrôle plus ce que je leur dis. Je sens qu'il y a quelque chose ou quelqu'un à l'extérieur, qui sait pour moi et qui, de temps en temps, se donne la peine de me transmettre (m'injecter, m'infuser ?) non pas une idée (l'idée est tellement rare, je trouve – enfin, c'est lui, le transmetteur qui trouve ! – qu'on peut affirmer qu'elle n'existe même pas dans notre monde, ici, sous la lune, mais seulement dans l'univers d'avant le Big-Bang ou dans celui d'après l'Apocalypse ; ceci dit, il faut se fier au Big-Bang et à l'Apocalypse), non pas une idée, donc, mais un certain état d'esprit merveilleux, constructeur, créateur – qui fait du bien, donc, qui peut être non seulement bienfaisant, mais bénéfique.
« Pourquoi ai-je le droit à ça ? Parce qu'on me considère malheureux ou parce que l'on veut que je transmette à mon tour et selon mes possibilités aux autres un état d'esprit bienfaisant, bénéfique ? Parce qu'on veut que je donne de mon miel (comme une abeille qui pense être capable de fabriquer du miel de l'âme et du savoir – après avoir avalé de l'âme et du savoir) ? »
Et là, padaboum.
« Tu n'as pas lu Platon, par hasard, hein ? »
Ce n'est pas une blague. D'autant moins deux. Et d'autant moins encore une idée. À peine une histoire. « L'histoire des seize enfants de Platon » ou celle de « Platon et ses seize enfants ».
- Ou plus.
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